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Par Mike H. VEN – Traduction – Adaptation : Roger MARQUET

Elargissement du corridor de Bastogne


Carte des Opérations pour l’élargissement du corridor de percée de Bastogne encerclée (27 décembre 1944 – 2 janvier 1945) (Alamy Stock Photo)

Pour bien suivre les mouvements divers de la 35th Infantry Division, il est conseillé de lire l’article qui suit, carte en main; en l’occurrence, il s’agit de la carte topographique au 1/25.000 n° 65 / 3 – 4  Bastogne – Wardin de l’Institut Géographique National.

COMPOSITION DE LA 35TH INFANTRY DIVISION.

Unités organiques

134th Infantry
137th Infantry
320th Infantry
35th Reconnaissance Troop (Mecz)
60th Engineer Combat Battalion
110th Medical Battalion
35th Division Artillery
161st Field Artillery Battalion (105 Howitzer)
216th Field Artillery Battalion (105 Howitzer)
219th Field Artillery Battalion (105 Howitzer)
127th Field Artillery Battalion (155 Howitzer)

Special Troops

735th Ordnance Light Maintenance Company
35th Quartermaster Company
35th Signal Company
Military Police Platoon
Headquarters Company
Fanfare

Unités attachées pendant la Bataille des Ardennes

Co C 735th Tank Bn
Co D 3d Mortar Bn
179th Field Artillery Bn (155 Howitzer)
1st Bn 101st Inf Regt.(26th Infantry Div)
654th Tank Destroyer Bn

Maj.Gen. Paul W.Baade, commandant la 35th Infantry Division – Photo 35th ID

La Bataille des Ardennes bat son plein lorsque la 35th Infantry Division entre en jeu.

Le 26 décembre, la 35ème Division d’Infanterie a quitté Metz, en France, pour se rendre au nord d’Arlon, le long de la frontière belgo-luxembourgeoise. Sa mission générale était définie comme suit : aider la Troisième Armée à agir dans le flanc sud du saillant de l’ennemi.
Pour l’opération, la division a été placée sous le contrôle du III Corps.
Le 654ème Bataillon de Chasseurs de Chars fut de nouveau rattaché à la division.

Le 27 décembre, la division attaqua vers le Nord, malheureusement sans reconnaissance préalable, depuis des positions situées le long de la rive sud de la Sûre, le 320ème Régiment d’Infanterie à droite et le 134ème Régiment d’Infanterie en réserve. La 4ème  Division Blindée se trouvait à gauche et la 26ème Division d’Infanterie sur sa droite. L’attaque a commencé à 08h00. Le 137ème  s’est déplacé le long d’une route reliant la zone de la 4ème Division Blindée à un point situé au SO de Tintange afin de traverser le fleuve en territoire ami et a réalisé des gains considérables de terrain jusqu’à ce qu’il atteigne le village de Surré. Là, il a rencontré une vive résistance et ce n’est qu’après une lutte acharnée qu’il a pu s’emparer de la localité. Le 320th Infantry éprouva des difficultés à traverser la Sûre.

La résistance des rives nord de la rivière était forte, mais le 3e Bataillon, à gauche, réussit à faire traverser des éléments à midi. Le 2e bataillon fit de même avec une compagnie dans l’après-midi. Plus tard, la résistance diminua et à la tombée de la nuit, le 2e bataillon se trouvait à Boulaide et à Baschleiden et le 3e bataillon se déplaçait vers le nord.

À 6 heures le 28 décembre, la 35ème poursuivit sa course contre le flanc du saillant ennemi. Le 137ème d’Infanterie n’a réalisé qu’un léger gain durant la journée. Le 2e bataillon a fait un petit gain au nord de Surré et le 3e bataillon est parvenu sur la colline au sud-ouest de Villers-La-Bonne-Eau où des tirs d’armes légères, de mortiers et d’artillerie ont été rencontrés. Les tentatives du bataillon d’entrer dans le village ont toutes été repoussées. Alors, pour aider ce 3ème Bataillon, le 1er Bataillon a quitté la réserve régimentaire pour se porter à gauche du 3ème.

Le 29, la division lance une nouvelle attaque à 8 heures. Les 1er et 2e bataillons du 137ème régiment d’infanterie poussent à la lisière nord du bois de Surré, tandis que le 3e bataillon ne fait que peu progresser dans son engagement à Villers-La-Bonne-Eau. Pendant ce temps, le 2e Bataillon du 320th Infantry était engagé dans une âpre bataille autour d’une ferme au sud-est de Harlange ( la Ferme Fuhrman) et finalement gagnait un peu de terrain.

35th Division au combat (détail) – Photo 35th ID

Le 134th Infantry est sorti de la réserve de division et a attaqué le nord et le nord-est. Le 3ème bataillon, déjà engagé, a poussé vers Lutrebois et s’est emparé de la majeure partie du village dès la tombée de la nuit.

Le 1er bataillon s’est déplacé jusqu’à Marvie, à trois kilomètres au sud-est de Bastogne, où il a pris contact avec des éléments de la 101ème  Division aéroportée dans la poche assiégée de Bastogne.

Le 2e Bataillon s’est déplacé pour combler le vide entre le 3e Bataillon et le 137ème  Régiment d’infanterie (3e Bataillon également).

Le matin du 30 décembre, l’ennemi lança une contre-attaque extrêmement puissante avec des chars et de l’infanterie des 167.Volksgrenadier et 1.SS Panzer Divisions contre les 134ème  et 137ème  Régiments d’infanterie. Les compagnies K et L du 137ème, dans le village de Villers-La-Bonne-Eau, ont été encerclés par des éléments de l’ennemi et de très fortes pressions ont été exercées sur le reste du régiment. Le 134th Infantry, touché par cette contre-attaque, a démarré à 08h00 mais a rencontré une très forte résistance depuis Harlange et surtout depuis la ferme située au sud-est de ce minuscule village. La contre-attaque, qui avait pour mission de couper la grand-route Bastogne – Arlon, fut repoussée. Et pourtant, l’infanterie qui a rencontré la résistance de l’ennemi, a bénéficié de l’aide considérable de la force aérienne et de l’artillerie. L’ennemi a été continuellement mitraillé, bombardé et soumis à des tirs d’artillerie extrêmement violents.

Le dernier jour de décembre, les tentatives d’attaque de la Division eurent peu de succès. Les tentatives visant à remédier à la situation des compagnies K et L / 137ème  RI ont échoué et elles ont donc été considérées comme perdues, surtout lorsque des prisonniers allemands ont déclaré que ces unités avaient été détruites ou capturées.

Le Sergent Herbert S. LIMAN (134th IR / 35th ID) à Lutrebois,
en train de tenter de localiser un sniper ennemi
Photo 35thID

Dans la matinée du 1er janvier 1945, les bataillons du 134th Infantry ont été requis pour préparer les positions de défense en cas de contre-attaque. Dans l’après-midi, le 134 attaque à 13h30. Le 1er Bataillon se dirige au-delà du carrefour à environ un kilomètre au sud-est de Marvie et les 2ème et 3ème Bataillons s’avancent vers Lutrebois et s’emparent d’une partie de la localité, à la nuit tombante. Le 137ème avec le 1er Bataillon du 320ème attaché, attaqua lui aussi à 13h30 mais, à cause d’une infiltration considérable de l’ennemi dans ses lignes, fut incapable de gagner du terrain. Sur son flanc droit, la compagnie C se défendait bien et pendant la journée, elle repoussa plusieurs petites contre-attaques. Des éléments des compagnies K et I, coupés de contacts avec les autres unités à Villers-La-Bonne-Eau, pendant les derniers jours de décembre, sont restés encerclés dans le village.  À 12 h 30, l’attaque par le 320ème (moins le 1er Bataillon) contre la ferme bien défendue située au sud-est de Harlange n’a entraîné qu’un léger gain, car l’ennemi y maintenait une défense obstinée.

Le 2 janvier, frappant vite et fort, le 1er bataillon du 137 balaya l’ennemi des bois à l’ouest de Villers-La-Bonne-Eau et aida la compagnie F à chasser les Allemands des autres bois au sud du carrefour routier de Villers. La compagnie E poussa vers le nord dans la même forêt. Après une lutte acharnée, elle s’est suffisamment plongée dans le bois que pour entrer en contact avec la compagnie F. Le 3e Bataillon du 320 est resté dans la zone de rassemblement derrière les lignes. Lors de son attaque contre la ferme fortement défendue (au SE de Harlange), le 320 n’a pas réussi à gagner le moindre terrain. Des tirs extrêmement lourds d’armes automatiques et de petit calibre ont été rencontrés. Au cours de l’après-midi, les P-47 Thunderbolts ont bombardé et mitraillé des chars ennemis et de l’infanterie dans la zone située au nord de Harlange.

Dans la nuit du 3 au 4 janvier, le 1er bataillon du 134 se déplaça dans les bois à environ trois kilomètres au nord de Lutrebois. À 17 heures, le bataillon attaqua au sud-est pour s’emparer du croisement routier au nord-est de Lutrebois. La compagnie B, se déplaçant rapidement, captura la colline 540 avec le commandant du bataillon ennemi et son quartier général. La compagnie C a parcouru plusieurs centaines de mètres au-delà de l’objectif et s’est engagée dans un échange de tirs intenses avec l’ennemi.

Le capitaine Joseph Brigandi (Company L Commander / 134th Inf.)
Photo 35thID

Le 4 janvier, dans le but de prendre contact avec le 3e Bataillon au sud, la compagnie A attaqua à 13 h 40 et deux heures plus tard rejoignit la compagnie B, mais sans avoir pris contact avec le 3e bataillon.

La compagnie C, qui se battait seule devant, s’est trouvée isolée et entourée d’ennemis, encerclée donc, mais 43 hommes et un officier ont réussi à regagner les lignes américaines pendant la nuit.
Pendant ce temps, le 3ème bataillon, ayant débarrassé Lutrebois du reste de l’ennemi, a attaqué au nord-est du village pour entrer en contact avec le 1er Bataillon. Le 2e Bataillon a essayé d’avancer mais n’a pas pu y arriver car des patrouilles ennemies et des groupes d’infiltration maintenaient une pression constante sur son flanc droit.
Le 137 espérait se rapprocher de Villers-La-Bonne-Eau mais finalement ne gagna que quelques centaines de mètres. Des tirs extrêmement violents ont eu lieu et des chars ennemis ont opéré dans la zone régimentaire. Avec l’aide de chars de la compagnie C du 35e bataillon de chars, le 2e Bataillon du 320 s’empara de la ferme que l’ennemi avait défendue avec acharnement.
Le 3e Bataillon se rendit ensuite dans les bois situés au nord de la ferme. De là, la compagnie E, appuyée par des chars, a attaqué Harlange et s’est emparée de plusieurs maisons à l’est du village.
À 17 h 30, cependant, une forte contre-attaque a chassé la compagnie et ses chars auxiliaires de la bourgade.

Le 5 janvier, le 1er Bataillon du 134 déplaça son attaque vers le nord-est. Le 2e Bataillon a maintenu ses positions, se protégeant contre les tentatives d’infiltration de l’ennemi. Le 3ème Bataillon traversa l’espace découvert à l’est de Lutrebois et se déplaça à la lisière ouest du bois, au nord-est du village. Contre-attaqué par l’ennemi revêtu d’uniformes américains, il s’est retiré jusqu’aux abords du village.

D’après les témoignages d’employés du Service des Sépultures (Ministère belge de l’Intérieur), chargés de relever les corps laissés sur place après les combats, les cadavres de plusieurs femmes allemandes, en tenue de combat, ont été ramassés à Lutrebois et expédiés directement au cimetière allemand de Lommel. (Témoignage de Jean-Marie Collignon dit JeanCo dont le père faisait partie de ce service).

Le 1er Bataillon du 320 fut relevé de son attachement au 137 et attaché au 134 pendant l’après-midi. Le 137 ne signala que de très légers gains de terrain. Le 1er Bataillon fut relevé de la première ligne et commença à passer à des positions situées derrière le 2e.
Dès que le 1er bataillon eut pris ses nouvelles positions, le 2e Bataillon attaqua vers l’est et  dégagea son territoire conquis de l’ennemi infiltré. Le 320 poursuivit sa lutte acharnée dans les environs de Harlange. Au cours de l’après-midi, son 2e bataillon repoussa une contre-attaque de trois chars et d’un nombre de fantassins considérable et passa le reste de la journée à réorganiser ses positions.

L’attaque du 3e bataillon à travers les bois à l’est de Harlange contre la résistance allemande croissante gagna peu de terrain.

La photo est connue, l’identité du G.I. moins:
Sgt Joseph Holmes (320th IR) à Wiltz
Photo 35th ID

Le 7 janvier, après une tentative infructueuse de s’emparer de positions sur la route Lutrebois – Lutremange, le 2e Bataillon du 134 se tint le long d’une ligne proche de la route. Le 1er Bataillon du 320, essayant toujours de se tenir à la hauteur du 1er Bataillon / 134, attaqua au cours de l’après-midi mais ne progressa pas. Le reste de la journée, le régiment continua à maintenir sa pression sur l’ennemi. Le 137 continua de tenir ses positions et adapta sa ligne de front après avoir relevé des éléments du 28e Escadron de cavalerie sur son flanc droit.
La Co C / 735ème Bataillon de Chars fut libérée de son attachement au 320 et attachée au 137. Dans le secteur du 320, le reste de la 101ème Airborne et des éléments du 6ème Groupe de cavalerie relevèrent le 2e Bataillon et le régiment se déplaça alors dans une zone de rassemblement aux environs de Bastogne, où il devait être attaché à la 6e Division blindée. La situation est restée la même pendant quelques jours. Le 134 a très peu avancé mais a quand même réussi à réduire une position fortifiée de l’ennemi, le 10 janvier.

Tous les attachements d’unités de la division à d’autres unités furent supprimés et l’entièreté du régiment fut ainsi reformée.

La 35th Infantry Division poursuivit sa réhabilitation et son entretien et effectua un entraînement de combat dans les jours suivants, après avoir fait mouvement vers Metz, en France, où elle poursuivit le combat.

La bataille des Ardennes est l’une des plus dures que la division eut à livrer dans cette guerre. Cela lui a coûté cher en vies humaines.

L’une des découvertes les plus horribles a eu lieu le 13 janvier 1945. Ce jour-là, une unité d’enregistrement des tombes a été appelée à Lutrebois, car un bataillon d’artillerie était en train de prendre position dans cette région. Les hommes de ce bataillon ont découvert des faits sinistres. Six soldats ont été retrouvés dans les bois, tous tués par une balle de petit calibre (arme portative) à bout portant. Après enquête, il devînt clair que les six soldats avaient été exécutés par l’ennemi après leur capture. L’unité qui a fait la découverte et l’enquête était dirigée par le lieutenant Reischel (3ème Bataillon / 134ème QG). Les victimes appartenaient toutes au 134ème régiment d’infanterie:

  • S/SGT Carl R. Sahli – Compagnie C
  • S/SGT David I. Bowen – Compagnie C
  • S/SGT Wilbur C. Pyle – Compagnie C
  • PFC Robert L. Stone – Compagnie C
  • PVT Russel L. Johnson – Compagnie C
  • PVT Troy R. Bader – Compagnie G

Quatre des soldats étaient déjà blessés lors de leur capture, car ils avaient été soignés avec des bandages américains, mais un petit trou de balle dans la tête démontrait qu’ils avaient trouvé la mort plus tard par le tir à bout portant d’une arme portative.

Les autres soldats n’avaient pas d’autres blessures, mais seulement le même type de balle dans la tête. Les manteaux, les blousons, les sangles et les chaussures avaient été enlevés à la plupart d’entre eux. Des objets personnels tels que des livres de paie et des plaques d’identité ont été retrouvés sur les restes des soldats. Les 6 soldats ont été signalés comme étant MIA (Missing In Action = disparus au combat) les 5 et 6 janvier 1945.

Cette journée est désormais connue sous le nom de « Jeudi désastreux, le meurtre des six » dans l’histoire de la 35ème Division d’infanterie.

Cette photo est une vue partielle des corps des victimes du Massacre de Baugnez,
mais c’est un peu à cela que devait ressembler la scène des 6 soldats de la 35th exécutés
Photo NARA

Lutrebois – Transport des victimes – Photo 35thID